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La maison des fées .:. Le livre des rêves - interprétation
 
Le rêve chez les Anciens

Un des plus anciens témoignages oniromanciens remonte à trois mille ans avant J.-C. A cette époque, dans le bassin mésopotamien, on assistait aux faits et gestes d'un grand héros appelé Gilgamesh.

« J'ai rêvé qu'une montagne m'ensevelissait » dit Gilgamesh « mais voici qu'apparaît un homme d'une beauté exceptionnelle qui me libère des rochers et me relève. »

Enkidu interprète le rêve et dit au héros : « La montagne est l'Humbaba monstrueux (le mal) qui tombera sur nous mais nous réussirons à nous sauver et nous l'abattrons. »

Depuis des temps immémoriaux, ainsi que le raconte la légende de Gilgamesh, l'homme exploite le monde onirique pour en tirer des conseils utiles et des prévisions. Dans l'Antiquité, les oniromanciens étaient aussi appréciés que les autres magiciens et le fait de réussir à interpréter les rêves leur conférait puissance et honneurs.

On pensait alors que les rêves étaient un pont entre les mondes naturel et surnaturel et qu'ils contenaient les révélations des dieux ou des démons.

Aristote disait que le rêve n'est pas un signe de la divinité, mais que son origine est démoniaque, car la nature elle-même est l'œuvre du démon, tandis que l'essence est l'œuvre de Dieu.

Pour les philosophes de l'Antiquité, le monde matériel et la vie à l'état de veille ne sont que pure illusion, tandis que, dans le sommeil, la réalité devient objective. Dans le rêve, l'action est intermédiaire et assume une valeur différente pour chaque homme.

L'homme sage pouvait avoir accès aux connaissances oniriques ; par conséquent, ses rêves étaient réels ; l'homme abstrus ne recevait que des messages erronés et son monde onirique était le reflet des hallucinations vécues à l'état de veille. Homère partageait ce point de vue : il disait que les rêves véridiques entrent par une porte d'ivoire, tandis que les faux rêves entrent par une porte de corne.

Selon Homère, l'homme choisit lui-même la porte à utiliser, selon le stade de son évolution spirituelle.

Dans les poèmes homériques, les rêves sont considérés comme une réalité objective réelle. Le rêveur assume un rôle passif et devient un instrument de la divinité. C'est justement parce que l'homme n'était qu'un lien entre Dieu et les autres hommes, qu'il devait être sage et pur.

Homère lui-même communiquait normalement avec le monde surnaturel par le biais des rêves et certains ont interprété sa cécité dans un sens allégorique. Il était aveugle vis-à-vis du monde externe, du monde illusoire car, en tant qu'initié, il percevait le monde transcendantal. Sa cécité était considérée comme la vue véritable.

Les rêves prémonitoires qu'on trouve dans l'Iliade et l'Odyssée étaient considérés comme des messages divins provenant du ciel et non comme des connaissances émanées de l'inconscient du poète. Homère ne décrit pas ses héros selon sa fantaisie ; à travers ses poèmes, il veut transmettre une connaissance réelle, liée à la tradition populaire et aux souvenirs de l'homme.

Le culte des héros, durant la période homérique présente une nette res­semblance avec le monde des saints de l'église catholique ; les héros homériques étaient transportés après leur mort dans les îles des âmes bienheureuses d'où ils pouvaient aider les hommes bons, en particulier grâce à l'action onirique.

Ainsi, les héros assumaient une valeur intermédiaire entre l'homme et la divinité et on pouvait s'adresser à eux pour les besoins les plus matériels.

La différence essentielle entre la conception du rêve chez les Anciens et la conception psychanalytique réside dans le fait que les premiers considéraient le rêve comme une action extérieure à homme, qui le recevait des dieux ou des démons, tandis qu'aujourd'hui, le rêve est considéré comme une action interne du sujet lui-même, essentiellement accomplie par le subconscient.

Dans les textes sacrés, les rêves apparaissent souvent pour informer le prophète de la volonté de Dieu.

Dans l'Ancien Testament, les premiers rêves de Joseph annonçaient sym­boliquement sa supériorité par rapport à ses mauvais frères. Joseph était un bon oniromancien, sa réputation parvint aux oreilles du pharaon qui l'engagea à la cour avec la tâche délicate d'interpréter ses rêves. Deux rêves du pharaon sont célèbres. Dans le premier, le pharaon se trouvait sur les rives du Nil d'où surgirent 7 vaches maigres qui dévorèrent 7 vaches grasses en train de brouter l'herbe, sur les rives du fleuve. Dans le second rêve le pharaon vit sept beaux épis qui avaient poussé à partir d'une seule tige ; puis 7 autres épis brûlés par le soleil germaient difficilement et dévoraient les épis mûrs. Joseph interpréta ces rêves au pharaon : les 7 vaches grasses et les sept épis mûrs représentaient sept années d'abondance, tandis que les 7 vaches maigres et les 7 épis vides annon­çaient 7 années de famine. Le pharaon ordonna que l'on fasse des réserves de blé en prévision de la famine qui survint, sauvant ainsi son peuple de la famine.

Nous connaissons aussi un rêve de Nabuchodonosor. Au VI e siècle av. J.-C. ce roi de Babylone vit l'image d'un arbre couvert de fruits qui se dressait jusqu'au ciel et se répandait sur toute la terre. Un être divin des­cendit du ciel, il commanda que l'arbre soit abattu et qu'on éparpille ses fruits et ses branches coupées ; par contre la souche fut liée avec du fer et du laiton. L'être divin remplaça également le cœur du roi par un cœur de bête féroce.

Le rêve de Nabuchodonosor annonçait la fin de son règne et sa folie. Les rêves sont également présents dans les évangiles, en tant qu'instruments utilisés par la divinité. Joseph, reçoit en rêve le message de l'ange qui le rassure au sujet de la maternité de son épouse : celui qu'elle porte est l'œuvre de l'Esprit Saint. De même lors du Massacre des Innocents le salut de Jésus est dû au message onirique adressé au même Joseph qui suit le conseil de fuir en Egypte.

Les Rois Mages eux aussi, reçurent en rêve la consigne d'éviter Hérode et de ne pas lui révéler le lieu de naissance de l'enfant Jésus. La communica­tion onirique est présente dans tous les textes sacrés : Bouddha reçut d'importants messages à travers les rêves et la première partie du Coran fut dictée en rêve au prophète Mahomet par l'archange Gabriel. Mahomet attribuait beaucoup d'importance aux rêves ; chaque matin il en faisait une analyse, avec l'aide de ses disciples.

Dans la Grèce antique on avait érigé des temples exclusivement dédiés à la divination onirique ; le temple d'Esculape était le plus connu. Esculape ou Asclépios, considéré comme étant le fils d'Apollon, tenait un rôle important dans le culte solaire et fut instruit par le centaure Chiron. Sa représentation symbolique, transmise au fil des siècles, est le serpent. On utilisait dans ce temple la technique de l'incubation. Après avoir suivi un système compliqué de préparation au rêve, le sujet dormait dans le temple. Au cours de la nuit, il recevait, sous une forme onirique, les réponses à ses demandes.

Durant l'incubation, les rêveurs étaient soumis à un régime strict qui éli­minait la viande et le vin, et ils devaient s'abstenir de toute activité sexuelle. Le corps devant être parfaitement propre, il fallait se laver à l'eau froide. On exécutait ensuite des rites spéciaux (actes propitiatoires envers les divinités).

Le rêveur était oint de substances spéciales et l'on procédait dans les lieux à des fumigations d'herbes magiques. Les femmes enceintes et les per­sonnes malades ne pouvaient pas pénétrer dans le temple pour préserver celui-ci des influences néfastes.

On érigeait des statues aux dieux du sommeil et des rêves, et, pour finir on se couchait dans une grotte qui servait de dortoir et où nichaient de gros serpents jaunes.

Au réveil, de nombreux sujets avaient reçu en rêve la visite des divinités et trouvé réponse à leurs demandes, qui concernaient généralement la santé et les soins à effectuer. Parfois certains rêveurs étaient guéris direc­tement par le dieu durant le rêve.

Comme le temple d'Esculape, celui d'Epidaure connut également une grande renommée ; les personnes qui y étaient invitées offraient aux divi­nités des tablettes votives, une tradition qui existe encore aujourd'hui dans l'église catholique.

Avec la technique de l'incubation le rêveur comprenait le motif de sa maladie, considérée comme un châtiment des dieux, dû aux fautes du rêveur. C'est l'ancienne formule de l'action et de la réaction qui, en Orient, a pris le nom de Karma.

La divinité acceptait le rituel de l'incubation comme un acte de repentir et suggérait en échange les soins appropriés.

En Egypte également, on érigeait des temples dédiés à l'art des rêves ; on y exécutait des rituels semblables à ceux de l'incubation. En Egypte, le dieu gardien du sommeil était Bes ; il avait pour tâche de chasser des rêves les esprits malins.

On s'adressait à cette divinité pour obtenir à travers le rêve une réponse à certains problèmes.

En Egypte, seuls certains prêtres avaient la charge d'interpréter les rêves qui étaient considérés comme une révélation que les dieux donnaient aux hommes.

L'interprétation moderne des rêves a ses racines dans la classification arabe. Les Arabes divisèrent les rêves en deux classes : les rêves mentaux qui avaient un contenu prophétique et les rêves de milieu qui étaient dus à des stimuli externes ou à des malaises internes. Pour les Arabes, la science des rêves a donc une valeur d'ordre psychanalytique. Avec eux commencent les premières classifications basées sur l'expérience millé­naire et sur l'intuition.

Cependant l'interprétation des Arabes est encore strictement liée au mys­tère divin, puisque Allah et ses anges agissent directement en donnant de bons rêves aux prophètes et aux hommes droits, et des rêves confus aux infidèles.

Chez les Arabes, comme chez les Grecs, la personne en attente d'un rêve véridique devait se soumettre à des rituels particuliers. Elle devait s'abste­nir de manger certains aliments et se coucher sur le flanc droit, la partie positive du corps.

Grâce à ce rituel, lui arrivaient des rêves dus à une action céleste et l'oniromancien devait pratiquer son art entre midi et le coucher du soleil. Dans l'Inde antique, le rêve était également tenu en grande estime et considéré comme un état intermédiaire entre l'illusion de l'état de veille et la réalité de l'état de sommeil sans rêves. Dans son rêve, l'homme s'achemine vers l'identification cosmique et effectue le premier pas vers la totalité.

L'évolution proprement analytique s'effectue grâce à Artémidore qui vécut à Rome au deuxième siècle après J.-C Artémidore étudia les rêves durant toute sa vie et les divisa en cinq catégories :

- les rêves symboliques : du genre de celui des sept vaches maigres et des sept épis du pharaon ;

- les rêves oracles : dus à des révélations divines et que nous appelons aujourd'hui paranormaux ;

- les rêves dus à l'imagination : ils émanent de désirs non réalisés ou irréalisables (théorie principale de Freud) ;

- les cauchemars : dus à des fractures profondes de l'inconscient ;

- les rêves-visions : que nous faisons les yeux ouverts.

C'est la première interprétation qui se réfère aux rêves d'imagination ; il s'agit donc de la première approche psychanalytique. Les rêves se clas­sent en outre en insomnium et somnium. Dans les premiers, on trouve des altérations psychologiques dues aux problèmes personnels. Les seconds ont une signification plus profonde ; on y trouve des symbolismes qui transcendent la personnalité et sont reliés à des niveaux supé­rieurs ; Jung leur donnera la définition « d'archétypes de l'inconscient collectif ».

Artémidor était favorable au système d'interprétation de « la signification contraire ». Selon ce système, chaque rêve devait être interprété selon son contraire. Par exemple, si on rêve la mort d'une personne de la famille, cela signifie qu'elle vivra longtemps.

Dans cette brève revue du rêve chez les Anciens, nous avons pu constater que, depuis l'Antiquité, l'homme a toujours attribué beaucoup d'impor­tance à cette partie de vie vécue durant les rêves.

Il a toujours perçu cette double existence qui, parfois, se confondait avec la vie à l'état de veille.

Le monde des rêves était, et est encore, pour l'homme un monde parallèle, fait de choses belles et laides, de bonheur et d'horreur, de paix et d'angoisse.

Lorsque l'homme s'aventure dans un rêve joyeux il se réveille avec le regret de retrouver la réalité, mais, lorsqu'il vit des cauchemars, il remercie le ciel d'avoir quitté le monde des rêves.

A mon avis, le monde des rêves n'est pas fait d'hallucinations ; au contraire, c'est un monde plus vrai et réel que le monde que nous percevons à l'état de veille durant lequel, comme il a été prouvé, nous perce­vons les hallucinations de la réalité subjective. Une chose est certaine : tout ce qui est présent dans la création a son utilité. Chacun de nous doit découvrir l'utilité de ses rêves.

 
 
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